Dans une petite salle au rez-de-chaussée d’un immeuble de Gaza City, dans les locaux des Comités de l’Union des femmes palestiniennes (CUFP), une psychologue anime un atelier avec une quinzaine d’enfants. Des petites affiches ont été collées au mur, chacune représentant un lieu sûr, sécurisant. La musique est lancée, et chacun est invité à choisir son affiche : le câlin réconfortant d’une mère, d’un père ou la maison familiale.
"Je me sens en sécurité avec ma famille, mes sœurs, mes frères et ma grand-mère qui étaient avec moi pendant la guerre", témoigne une des enfants, interrogée par Soha Saloha, la psychologue. Ahmed, 8 ans, s’est adossée au dessin d’une mosquée, "car Dieu nous protège de toutes les peurs et de toutes les horreurs".
Exprimer son traumatisme par le dessin
Après ce premier exercice, tous sont invités à s’asseoir au sol et à dessiner, leurs peurs, leurs craintes. Dana, 12 ans, présente une maison, sur laquelle "ils tirent des missiles". "J’avais peur de perdre ma maison, en entendant le bruit des bombardements", raconte-t-elle, un peu soulagée par cet atelier qui "fait du bien car j’exprime mes sentiments et je laisse s’en aller ce qu’il y a l’intérieur".
"Elle a dessiné des détails, des pierres qui volent en éclat, on voit bien l’impact qu’ont eu les événements sur les esprits des enfants", insiste Soha Saloha. Entre le 10 et le 21 mai, 254 palestiniens sont morts dans la bande de Gaza, sous les bombardements de Tsahal. En Israël, les tirs de roquettes et de missiles du Hamas, au pouvoir dans l’enclave palestinienne, ont fait 12 morts. À Gaza, "certains enfants ont vu leurs maisons bombardés, détruites, certains ont eu des proches tués", ajoute Rolla Al Shareef, consultante pour le CUFP, également psychologue.
Isolement et troubles alimentaires chez les enfants gazaouis
Alors ses équipes font face à différents symptômes : "Certains restent isolés, ne veulent plus parler, ils ont des troubles alimentaires, mangent moins ou beaucoup plus, c’est un diagnostic de troubles traumatiques", détaille-t-elle. Elle s’attend à voir apparaitre des symptômes de trouble post traumatiques, dans quelques semaines, au minimum un mois après les bombardements.
Et à Gaza, qui connait des guerres à répétition depuis 15 ans, le traumatisme peut être plus profond. "Nous nous attendons à prendre en charge des problèmes difficiles, comme après la guerre de 2014, quand beaucoup de jeunes ont tenté de se suicider", témoigne Rolla Al Shareef. Dans ce contexte, les équipes de cette organisation qui vient en aide aux enfants et intervient également au domicile des familles tentent de "reconstruire les personnalités, de les consolider, les aider à gérer la crise : c’est difficile mais nous y arriverons".